Philippe Saucier in Études internationales
Le commerce international est-il au bord du gouffre ? Le processus de « globalisation » de l’économie mondiale, l’ouverture aussi bien aux échanges qu’aux investissements directs, présentés longtemps comme irréversibles, ont-ils trouvé leurs limites depuis le déclenchement d’une crise financière en 2008 ?
Pour tenter de répondre à cette question, l’auteur avance avec une infinie prudence. Il revendique tout d’abord la primauté des faits, des observations statistiques, sur les conjectures théoriques qui lui semblent trop marquées par des schémas de pensée qui ne prennent pas bien la mesure de bouleversements majeurs et soudains, tels que des crises financières d’ampleur mondiale. Il en voit pour preuve les retards dans la prise en compte du retournement brutal de tendance de l’automne 2008 et, finalement, la sous-évaluation systématique et massive des prévisions d’évolution du commerce mondial. Les experts de l’Organisation mondiale du commerce sont visés.
À cet égard, Bergeijk estime plus pertinent d’examiner minutieusement les points communs et les différences entre ce dernier épisode et les crises précédentes qui se sont traduites par une diminution du volume du commerce mondial. Il mentionne la crise asiatique de 1997 et la crise du secteur lié aux technologies internet en 2001, mais ces deux retournements ont été de courte durée. Le parallèle qui est poursuivi tout au long de l’ouvrage, c’est celui fait avec la crise de 1929. L’inspiration est évidente. L’analyse qui en avait été faite par le grand économiste néerlandais Jan Timbergen est pour l’auteur un manifeste méthodologique : priorité aux statistiques, discussion critique des statistiques, refus des conclusions hâtives ou des constructions théoriques mal étayées.
Les défauts de cette approche résident précisément dans ses qualités. Lorsque l’auteur passe en revue les différentes hypothèses qui ont été avancées pour expliquer le retournement brutal de tendance du commerce international, il s’avoue incapable de trancher de manière nette. La situation de détresse du secteur financier a-t-elle exercé un frein sur le financement du commerce ? Rien ne lui permet de l’affirmer. Peut-on dire que les crédits octroyés par les exportateurs se seraient resserrés ? Là encore, on manque de conclusion forte, bien qu’un effet ait été mis en évidence dans divers travaux discutés.
La partie qui sans doute nous offre le mieux la « perspective alternative » dont l’auteur se revendique est celle dans laquelle sont mises en doute les conclusions d’auteurs qui privilégient la prédominance dans le commerce international du fractionnement des processus de production, notamment l’importance du commerce intrafirme au sein d’entreprises multinationales. La critique méthodologique de ces travaux est sévère et, de ce fait, les conclusions des auteurs tombent. Il n’est pas certain que l’excès de globalisation soit la cause de la brutalité du retournement.
Alors, que reste-t-il ?
L’ouvrage évoque une piste alternative, sans vraiment apporter de preuve empirique. Si le commerce s’est effondré, ce n’est pas tant sous l’effet d’une contamination du secteur financier que comme résultat d’une montée de « l’incertitude ». Les références à Keynes sont évidentes, les remèdes proposés sont bien dans la lignée de Timbergen, celle d’un État, non pas correcteur du marché, mais réducteur d’incertitude.
Un ouvrage stimulant, mais dans lequel l’auteur, faute de recul et donc de statistiques suffisamment longues, ne donne pas toute sa mesure.
Pour tenter de répondre à cette question, l’auteur avance avec une infinie prudence. Il revendique tout d’abord la primauté des faits, des observations statistiques, sur les conjectures théoriques qui lui semblent trop marquées par des schémas de pensée qui ne prennent pas bien la mesure de bouleversements majeurs et soudains, tels que des crises financières d’ampleur mondiale. Il en voit pour preuve les retards dans la prise en compte du retournement brutal de tendance de l’automne 2008 et, finalement, la sous-évaluation systématique et massive des prévisions d’évolution du commerce mondial. Les experts de l’Organisation mondiale du commerce sont visés.
À cet égard, Bergeijk estime plus pertinent d’examiner minutieusement les points communs et les différences entre ce dernier épisode et les crises précédentes qui se sont traduites par une diminution du volume du commerce mondial. Il mentionne la crise asiatique de 1997 et la crise du secteur lié aux technologies internet en 2001, mais ces deux retournements ont été de courte durée. Le parallèle qui est poursuivi tout au long de l’ouvrage, c’est celui fait avec la crise de 1929. L’inspiration est évidente. L’analyse qui en avait été faite par le grand économiste néerlandais Jan Timbergen est pour l’auteur un manifeste méthodologique : priorité aux statistiques, discussion critique des statistiques, refus des conclusions hâtives ou des constructions théoriques mal étayées.
Les défauts de cette approche résident précisément dans ses qualités. Lorsque l’auteur passe en revue les différentes hypothèses qui ont été avancées pour expliquer le retournement brutal de tendance du commerce international, il s’avoue incapable de trancher de manière nette. La situation de détresse du secteur financier a-t-elle exercé un frein sur le financement du commerce ? Rien ne lui permet de l’affirmer. Peut-on dire que les crédits octroyés par les exportateurs se seraient resserrés ? Là encore, on manque de conclusion forte, bien qu’un effet ait été mis en évidence dans divers travaux discutés.
La partie qui sans doute nous offre le mieux la « perspective alternative » dont l’auteur se revendique est celle dans laquelle sont mises en doute les conclusions d’auteurs qui privilégient la prédominance dans le commerce international du fractionnement des processus de production, notamment l’importance du commerce intrafirme au sein d’entreprises multinationales. La critique méthodologique de ces travaux est sévère et, de ce fait, les conclusions des auteurs tombent. Il n’est pas certain que l’excès de globalisation soit la cause de la brutalité du retournement.
Alors, que reste-t-il ?
L’ouvrage évoque une piste alternative, sans vraiment apporter de preuve empirique. Si le commerce s’est effondré, ce n’est pas tant sous l’effet d’une contamination du secteur financier que comme résultat d’une montée de « l’incertitude ». Les références à Keynes sont évidentes, les remèdes proposés sont bien dans la lignée de Timbergen, celle d’un État, non pas correcteur du marché, mais réducteur d’incertitude.
Un ouvrage stimulant, mais dans lequel l’auteur, faute de recul et donc de statistiques suffisamment longues, ne donne pas toute sa mesure.
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